Notice
Etude des mécanismes de production et de dépôt des composés de la fumée lors du fumage de la chair de poisson : contribution à l'obtention de produits sains possédant de bonnes propriétés organoleptiques
Catanéo C.
Thèse, 2011
Adresse internet : http://archive.bu.univ-nantes.fr/pollux/show.action?id=1e57505e-a1dd-4f5e-813d-f5b833e1ca76
Analyse
Les travaux présentés dans cette thèse ont pour but d'apporter des éléments nouveaux pour la maîtrise du procédé de fumage, que ce soit lors de la production de la fumée ou de l'exposition du produit à celle-ci. L'objectif est d'aboutir à des produits plus sains possédant tout de même des qualités organoleptiques (odeur, saveur, couleur, texture) appréciées des consommateurs.
En effet, le problème central du fumage est que la fumée, qui apporte au produit frais les composés aromatiques lui conférant les qualités gustatives recherchées par les consommateurs (en particulier odeur et goût de fumée), apporte également des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP). Ces contaminants génotoxiques et carcinogènes posent de réelles questions de santé publique pour les produits fumés, car même s'il a été montré qu'ils ne sont présents qu'à de très faibles concentrations, ils possèdent la propriété de s'accumuler dans l'organisme et d'engendrer des toxicités sur le long terme.
Ces toxicités \\"cumulées\\" sont d'autant plus préoccupantes que la consommation de poissons fumés a connu de fortes augmentation dans la dernière décennie, amplifiant d'autant l'exposition des consommateurs aux HAP. Pour ces raisons, l'Union Européenne durcira prochainement les règlementations qui fixent les contaminations maximales admissibles dans les poissons fumés, afin de garantir aux consommateurs des produits moins nocifs.
Afin de réduire la contamination du produit fini, de plus en plus d'industriels ont recours à l'utilisation de fumées liquides, d'arômes de fumées ou de régénérations de fumées qui présentent l'avantage de pouvoir être purifiées plus efficacement que des fumées \" réelles \". Cependant, des règlementations plus drastiques concernant ces techniques sont également à venir, sans oublier qu'elles assujettissent les producteurs de fumaisons aux producteurs d'arômes et de fumées liquides.
Les travaux ont consisté dans un premier temps en l'étude approfondie d'un générateur de fumée industriel fonctionnant par friction qui a été sélectionné pour sa praticité de mise en œuvre et la plus grande maîtrise qu'il offre des paramètres de génération de la fumée (en particulier en terme d'homogénéité de matière première et de température de pyrolyse du bois).
L'utilisation de la précipitation électrostatique des fumées produite par le pilote expérimental a permis l'analyse directe de leur teneur en deux familles chimiques d'intérêt :
-les HAP, indésirables dans le produit fini à cause de leur toxicité,
-les composés phénoliques volatils, recherchés lors du fumage, porteurs de l'odeur de fumée typique ainsi que de nombreuses propriétés technologiques (antioxydant, antimicrobien, etc.).
Les résultats obtenus soulignent qu'il est possible de faire varier efficacement la composition globale d'une fumée et qu'il est potentiellement envisageable de favoriser sélectivement la formation des composés phénoliques volatils plutôt que celle des HAP. Bien que les résultats ne puissent être considérés comme définitifs sur un sujet aussi complexe, ils soulignent notamment l'importance d'un paramètre déterminant bien que peu cité dans la littérature : la dureté du bois utilisé.
Par ailleurs, des études conséquentes ont été réalisées afin de mettre en évidence le rôle de la composition du produit à fumer dans les mécanismes de dépôt se déroulant à l'intérieur du fumoir. Pour cela, des produits modèles à base d'huiles et de chair de poisson ont été fumés à deux échelles différentes :
- conditions réelles dans une enceinte de fumage industrielle,
- conditions modèles à l'échelle laboratoire, avec une méthode d'espace de tête innovante.
L'ensemble des données obtenues a permis de souligner l'impact déterminant du \" fumage par adsorption \" (passage de molécules à l'état gazeux directement vers la chair de poisson) vis-à-vis du \" fumage particulaire \" (dépôt des microparticules de fumée en surface). Ces résultats permettent notamment de mettre en évidence l'importance de la régénération de la phase gazeuse en plus de la pulvérisation/nébulisation classique lors de la mise en œuvre de fumées liquides en lieu et place d'un fumage direct.
Qui plus est, les échantillons modèles utilisés ont permis de mettre en évidence l'importance de la composition du filet de poisson, tout en s'affranchissant de sa variabilité de structure naturelle. Il est ainsi à noter que, comme la nature et la quantité de la phase lipidique permet une modulation de la cinétique de fumage, la connaissance des filets de poisson mis en œuvres peut être déterminante et justifier l'adaptation du procédé au cas par cas (en particulier en passant d'un poisson maigre à un poisson gras).
Il est également à souligner que bien que les expériences aient été réalisées avec des matières premières issues de poisson, la plupart des résultats sont transposables à d'autres industries du fumage, en particulier la filière carnée qui traite de nombreux produits structurellement proches des matrices modèles mises en œuvre ici.
L'ensemble des résultats obtenus constitue donc à la fois un apport conséquent à la connaissance des mécanismes se déroulant lors du fumage, mais permet également d'apporter une approche plus rationnelle de la mise en œuvre concrète du procédé industriel de fumage de produits alimentaires.