Notice
Poissons et invertébrés au large des côtes de France . Indicateurs issus des pêches scientifiques. Bilan 2004
Bertrand J., Cochard M.L., Coppin F., Léauté J.P., Lobry J., Mahé J.C., Morin J., Poulard J.C.*, Rochet M.J., Schlaich I., Souplet A., Trenkel V., Vérin Y.
* Ifremer, Centre de Nantes, BP 21105 44311 Nantes cedex 03 ; Tél : 02.40.37.41.08 ; Fax : 02.40.37.40.75 ; E-mail : Jean.Charles.Poulard@ifremer.fr
Rapport, 2007, n° EMH : 07-001, p. 1-84
Adresse internet : http://www.ifremer.fr/docelec/doc/2007/rapport-2327.pdf
Analyse
L'approche écosystémique de la gestion des ressources naturelles a pour objectif l’approcher d'un équilibre entre les besoins de la société et les contraintes et interactions naturelles et humaines s’exerçant sur les compartiments biologiques et physiques des écosystèmes exploités. L'intégration de la gestion des pêches dans une approche écosystémique est recommandée par les organes consultatifs internationaux («Code de conduite pour une pêche responsable» de la FAO de 1995). Elle est également inscrite dans les conventions et accords : convention sur la diversité biologique en 1992, déclarations de Reykjavik - 2001 et de Johannesburg - 2002. Sur le plan européen, la volonté de sa mise en oeuvre s’exprime dans les textes relatifs à l'environnement marin et à la gestion de la pêche, notamment le projet de directive sur la stratégie marine.
La mise en oeuvre de l'approche écosystémique implique le développement de programmes de surveillance des écosystèmes exploités pour estimer les effets des mesures de gestion. L'élaboration de tableaux de bord suivant l’évolution dans le temps de l’état des écosystèmes exploités par la pêche, constitue un enjeu fort pour la recherche halieutique.
La communauté scientifique, les organisations des pêches et l'ensemble des parties prenantes portent un intérêt croissant au développement d'une gestion intégrée des espaces marins exploités par la pêche. Une étape importante vers cet objectif est la disponibilité de données scientifiques précises et fiables sur les différentes composantes du système halieutique. La restitution, à des fins opérationnelles, des résultats de ces observations passe par la formalisation de tableaux de bord synthétiques, et la communauté scientifique internationale réfléchit actuellement aux méthodes d'élaboration de ces tableaux. La démarche de l’Ifremer s’appuie sur les dernières avancées scientifiques en ce domaine, et pour répondre à sa mission de suivi du secteur halieutique, l’Institut a défini un Système d'information halieutique (SIH) qui prend en charge un ensemble d'observations et d'enquêtes sur le secteur de la pêche (activité d'exploitation, données économiques) et les ressources exploitées. Sa mission est d'organiser le recueil, l’archivage et la gestion de ces données en base centralisée pour les mettre à la disposition de la communauté scientifique, des gestionnaires et des organisations des pêches, sous forme de produits élaborés.
L'Ifremer organise depuis une vingtaine d'années des campagnes d'observation halieutique le long des côtes de France afin de produire des indices d’abondance des espèces d'intérêt halieutique. Ces campagnes constituent une base de connaissance primordiale pour caractériser et suivre l'état des communautés exploitées de poissons et d’invertébrés. Elles concernent les plateaux continentaux bordant le littoral français du sud de la mer du Nord à la Méditerranée, le domaine pélagique du golfe de Gascogne et du golfe du Lion, ainsi que des zones côtières estuariennes. Ces campagnes s’inscrivent dans des séries conduites selon des protocoles d'observation standardisés. Les plus anciennes séries disponibles ont débuté vers le milieu des années 1970. Certaines campagnes sont réalisées dans le cadre de programmes internationaux : International Bottom Trawl Survey (IBTS) du Conseil International pour l’Exploration de la Mer (CIEM), International Bottom Trawl Survey in the Mediterranean (MEDITS) en Méditerranée. Depuis 2002, une partie des campagnes bénéficie du soutien financier de la Commission européenne, dans le cadre du règlement européen sur la collecte des données halieutiques.
A partir de 2001, la coordination de l’exploitation des données de campagnes s’est accrue pour élaborer des outils communs d’analyse et des tableaux de bord sur les populations et les communautés échantillonnées. La construction d'indicateurs a été engagée par un groupe de travail rassemblant les biologistes, des bio-statisticiens et des écologues de l'Ifremer. Le groupe s'est appuyé sur les recherches méthodologiques sur les indicateurs menées par les scientifiques de l'institut, et a développé un outil informatique dédié au calcul des estimateurs sélectionnés. Les résultats de ces travaux ont été diffusés (Bellail et al. 2003 ; Rochet et al. 2004a ; Rochet et al. 2005).
De nombreux colloques et groupes de travail internationaux sont actuellement consacrés aux indicateurs écosystémiques. Si les concepts de base sont relativement bien définis, le passage à l'application se heurte encore à des difficultés méthodologiques et pratiques. Le groupe a choisi une approche progressive conduisant à sélectionner en priorité des indicateurs d'interprétation explicites et validés, et entend poursuivre son activité en étendant la démarche à l'ensemble des séries de campagnes du SIH, en élargissant la palette des indicateurs afin d’améliorer la prise en compte de la diversité et de la complexité des différentes composantes des systèmes en interaction. Il s'agira d'élaborer, en concertation avec les autres acteurs du SIH, des synthèses permettant d'intégrer des indicateurs portant sur l'ensemble des écosystèmes suivis, incluant l'environnement, le climat et les activités humaines. Les indicateurs ainsi constitués ont également vocation à contribuer à différentes approches sectorielles, comme le nouveau projet européen IMAGE (Indicators for fisheries management in Europe) qui développe des tableaux de bord opérationnels en soutien à une gestion écosystémique des pêches et à des approches thématiques comme la Stratégie nationale pour la biodiversité.
Le présent rapport porte sur les biocénoses démersales des plateaux du sud de la mer du Nord aux côtes orientales de la Corse, sur des zones de nourriceries estuariennes de Manche et du golfe de Gascogne et les abords du cap de Flamanville (Manche). Il rend compte de l'état et de l'évolution de ces écosystèmes à partir d'indicateurs dynamiques basés sur des données issues des campagnes d'observation halieutique pilotées par l'Ifremer. Ces indicateurs sont calculés pour un ensemble d'espèces propres à chaque zone.
Les résultats sont présentés sous forme de fiches synthétiques par zone dans la première partie du document, décrivant les tendances de l'abondance, de la taille et du poids moyens des populations et des communautés suivies. Une espèce est présentée de façon plus détaillée pour chaque zone. Les indices ont été sélectionnés parmi les indicateurs démographiques particulièrement sensibles à l’impact de la pêche. L’interprétation des tendances qu’ils décrivent doit également tenir compte du contexte environnemental dans lequel vivent les populations concernées. La deuxième partie répond à ce besoin et présente des repères sur la biogéographie des zones couvertes par le système d'observation.
Un premier fascicule présentait les résultats obtenus à partir des données collectées jusqu’en 2002.
Ce « Bilan 2004 » approfondit les analyses tant sur l’espèce, présentée de façon détaillée, que sur les communautés. Il actualise les diagnostics sur les populations et les communautés d’intérêt halieutique des côtes de France ; les données des dernières campagnes sont exploitées et enrichies par l’utilisation des plus récents développements méthodologiques sur l'élaboration d'indicateurs validés par la communauté scientifique.
A l’exception de l’est de la Corse, la plupart des communautés étudiées étaient déjà fortement perturbées par la pratique de la pêche au début des périodes d’observation. Les résultats obtenus ne montrent aucun signe d’amélioration. Une aggravation de l’état des populations et communautés a pu être décelée dans la moitié des cas, suite à l’intensification de la pêche ou par l’effet combiné de l’exploitation et des changements environnementaux, à différentes échelles spatiales : baie de Vilaine, Manche, mer Celtique, golfe de Gascogne et golfe du Lion.
Analyse réalisée par: Poulard J.C. / IFREMER