Notice
Epidémiologie de la listériose humaine et les produits de la mer
Epidemiology of human listeriosis and seafoods
Rocourt J., Jacquet Ch., Reilly A.
Centre National de Référence des Listeria, Institut Pasteur, 28 rue du Docteur Roux, 75724 Paris Cedex 15, France
International Journal of Food Microbiology, 2000, Vol. 62 (3), p. 197-209 - Texte en Anglais
Analyse
La listériose, maladie alimentaire due à une bactérie pathogène, Listeria monocytogenes, affecte essentiellement les personnes dont le système immunitaire est perturbé, comme les femmes enceintes, les foetus, les personnes âgées ou immunodéficientes. Les symptômes vont de fièvres, maux de tête, myalgies et avortements chez les femmes enceintes, à de sévères septicémies et méningites chez les nouveaux nés et à l'infection du système nerveux central et méningé ou bactériémies chez les adultes. Bien que la listériose soit une maladie rare (1.6 à 6 cas / million d'habitants) le taux de létalité est très élevé : 20 à 30 % au total mais 38 à 45 % pour les personnes à risque. Les publications concernant l'analyse des risques sont limitées, probablement par le fait que la dose minimale infective de L. monocytogenes n'est pas connue. Cette dose dépend en effet de l'hôte, de la virulence des souches et de l'aliment consommé. Il semble cependant qu'un très faible nombre de L. monocytogenes (< 100 germes / g) ne puissent pas provoquer la listériose.
Depuis 1987, la plupart des pays industrialisés ont mis en place différents systèmes de surveillance, dont les données ne sont malheureusement pas toujours comparables. Différentes techniques phénotypiques et moléculaires de typage des souches de L. monocytogenes ont été développées et permettent une surveillance quotidienne ainsi que des études épidémiologiques. Les principaux résultats acquis ces 10 dernières années montrent que :
- il n'y a pas de distribution géographique particulière des souches de L. monocytogenes;
- il n'y a pas de corrélation entre l'origine (humaine, animale, alimentaire, environnementale) ou le typage d'une souche (serovar, phagovar, ribovar, profil ADN) et sa virulence. Ainsi, toutes les souches de L. monocytogenes doivent être considérées comme potentiellement pathogènes pour l'homme;
- la transmission de la maladie se fait essentiellement par l'ingestion d'aliments contaminés.
L. monocytogenes peut entraîner des cas sporadiques de listériose ou des épidémies (plus de 5 cas liés à la même souche). L'auteur recense les principales épidémies, pour lesquelles il apparaît que la plupart des aliments peuvent être incriminés : produits laitiers, carnés, végétaux et produits de la mer. Les aliments à risque sont souvent des plats cuisinés prêts à consommés qui sont stockés au froid pendant une période assez longue, permettant le développement de L. monocytogenes.
En ce qui concerne les produits de la mer, beaucoup d'études indiquent qu'ils sont fréquemment contaminés par L. monocytogenes. Les produits de la mer peuvent être classés en 2 catégories :
- les produits à hauts risques :
. mollusques (moules, clams, huîtres...)
. poissons consommés crus
. produits légèrement traités (NaCl < 6 % en phase aqueuse, pH > 5) comme les produits salés, marinés, fermentés ou fumés)
. produits légèrement chauffés comme les poissons ou crustacés pasteurisés, fumés à chauds ou pré-cuits
- Les produits à bas risques :
. semi-conserves (NaCl > 6 % en phase aqueuse, pH > 5, agents de préservation comme le sorbate, benzoate, NO2...);
. les produits ayant reçu un traitement thermique approprié (stérilisation);
. les produits séchés, séchés-salés ou séchés-fumés;
. les poissons et crustacés frais ou congelés.
Malgré la contamination fréquente des produits de la mer, aucune grande épidémie n'a jamais été observée jusqu'à présent. Pour l'auteur, ce résultat s'explique par la plus faible consommation de produits de la mer à risque comparée à la consommation de produits laitiers ou carnés et par le fait que les usines de transformation des produits de la mer sont souvent beaucoup plus petites. Un tableau résume les cas connus de listériose dus aux produits de la mer, le principal étant lié à la consommation de gravads de truite (truite salée), qui a entraîné 9 cas, dont 2 morts.
L'auteur conclut son article en proposant différentes recommandations et pistes de recherches.
Analyse réalisée par : Leroi F. / IFREMER