Notice

Les maladies limiteront l'offre alimentaire future des crustacés de pêche et d'aquaculture à l'échelle mondiale

Disease will limit future food supply from the global crustacean fishery and aquaculture sectors

Stentiford* G. D., Neil D. M., Peeler E. J., Shields J. D., Small H. J., Flegel T. W., Vlak J. M., Jones B., Morado F., Moss S., Lotz J., Bartholomay L., Behringer D. C., Hauton C., Lightner D. V.

*European Union Reference Laboratory for Crustacean Diseases, Centre for Environment, Fisheries and Aquaculture Science (Cefas), Weymouth Laboratory, Weymouth, Dorset DT4 8UB, UK ; E-mail : grant.stentiford@cefas.co.uk

Journal of Invertebrate Pathology, 2012, Vol. 110 (2), p. 141-157 - Texte en Anglais

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Résumé

Les crustacés d'élevage et de pêche représentent une production annuelle supérieure à 10 millions de tonnes avec une valeur de première vente de 40 milliards de dollars. Le secteur est dominé par les crevettes tropicales d'élevage marin qui est le secteur le plus dynamique de l'industrie aquacole mondiale. Ce secteur est important comme moyen de subsistance en milieu rural et permet de réduire la pauvreté dans les pays producteurs en Asie et en Amérique latine, tout en contribuant de façon croissante à l'approvisionnement alimentaire en produits aquatiques des pays développés. Les pays producteurs avec des frontières maritimes ont par ailleurs souvent des pêcheries de crustacés marins qui sont commercialisés régionalement.
La séparation entre les pays producteurs et les pays consommateurs de crustacés a créé une véritable industrie agro-alimentaire mondiale. Les projections de demande mondiale croissante pour les produits de la mer font face à la constance ou au déclin de la pêche, ce qui nécessitera une expansion et une intensification de l'aquaculture avec une utilisation optimale des produits capturés. A cela s'ajoute la pression continue des pays consommateurs pour garantir des produits sûrs pour la consommation humaine et des dispositions législatives concernant la santé des animaux et l'origine des produits.
En conséquence, l'accent est mis sur une meilleure application des règlements. Actuellement il s'agit d'un réel défi car l'industrie est fragmentée et les réglementations des pays producteurs concernant les maladies animales sont moins strictes que celles des pays consommateurs.
Selon les estimations actuelles jusqu'à 40% de la production de crevettes tropicales (> 3 milliards de dollars) est perdue chaque année, principalement à cause de pathogènes viraux pour lesquels les mesures préventives (par exemple la vaccination) ne sont pas réalisables. Face à ce problème, de nouvelles approches sont urgentes pour améliorer les pratiques : amélioration des géniteurs et des larves, meilleures pratiques de gestion, sensibilisation des aquaculteurs et soutien à la recherche qui vise à exploiter les capacités naturelles des invertébrés à atténuer les agressions des agents pathogènes (par exemple l'utilisation de thérapies par interférence-A.R.N).
Quant aux pertes du secteur halieutique associées aux maladies, les questions clés sont centrées sur la mortalité et la dégradation de la qualité après capture, en grande partie dues à de mauvaises manipulations et classifications par les pêcheurs et la chaîne sectorielle, essentiellement quand les crustacés sont conservés vivants.
La présence de maladies chez les crustacés sauvages a été largement signalée. Les changements climatiques sont susceptibles d'augmenter certains agents pathogènes importants (par exemple, le parasite Hematodinium). Toutefois malgré des améliorations dans le diagnostic des maladies, à l'échelle du laboratoire et du terrain, les effets des maladies sur ces pêcheries restent insaisissables. Une coordination entre spécialistes de ces maladies et scientifiques des pêches est nécessaire pour comprendre les incidences actuelles et futures des maladies existantes et émergentes sur les stocks sauvages.
Face à une demande croissante de crustacés marins, la problématique liée à leurs maladies donne un avertissement clair pour la viabilité future de cette industrie mondiale. Une coopération entre les experts en aquaculture, en pêche et en commercialisation de crustacés avec les pathologistes, épidémiologistes, écologistes et décideurs dans le domaine de la sécurité alimentaire permettrait à ces questions d'être mieux identifiées et traitées.