Notice

Bilan de la surveillance 2008 des niveaux de contamination en mercure dans les produits de la pêche - Évolution des recommandations de consommation

Velge * Pierre , Pinte Jérémy, Noël Laurent, Guérin Thierry

* Ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche, DGAL, Bureau des produits de la mer et d'eau douce

Bulletin épidémiologique, 2010-03, n° 36

Adresse internet : http://agriculture.gouv.fr/bulletin-epidemiologique-no-36


Résumé

Le mercure est un métal toxique présent dans l'environnement sous forme métallique (Hg) ou organique (méthylmercure ou MeHg). La forme organique est nettement plus toxique pour l'homme. Le mercure s'accumule principalement dans la chair musculaire. Le niveau de contamination des poissons augmente avec leur âge et leur place dans la chaîne alimentaire ; ainsi les poissons pélagiques, carnivores à longue vie ont en général des teneurs en MeHg plus élevées que les autres espèces. C'est pourquoi, la réglementation communautaire fixe un seuil à 1 mg/kg en mercure total de poids à l'état frais (pf) pour ces espèces situées en fin de chaîne alimentaire et un seuil à 0,5 mg/kg pf pour les autres espèces.
Le mercure est neurotoxique, il provoque notamment des retards de développement du système nerveux. Les individus les plus sensibles sont les enfants de moins de deux ans et les foetus, exposés via l'alimentation de leur mère.
Plans de surveillance et de contrôle de la Direction Générale de l'Alimentation (DGAL)
Un plan de contrôle (mercure, plomb et cadmium) spécifiquement orienté sur les espèces de requins (sélaciens) débarquées en France, a été réalisé en 2007. Les analyses ont porté sur le mercure total pour lequel il existe un seuil réglementaire. Ensuite, bien que la littérature mentionne des teneurs variables en MeHg (69 à 100 % du Hg total), selon l'espèce, la zone de pêche, le régime alimentaire et l'âge, il a été considéré que 100 % du mercure total est sous forme de MeHg (les analyses de MeHg sont nettement plus longues et onéreuses que celles de Hg total). Au total, 91 prélèvements de poissons grands prédateurs ont été réalisés sur les espèces les plus fréquemment consommées : aiguillat, émissole, raie, requin commun, requin-hâ, roussettes et siki. Cinq résultats se sont avérés supérieurs à 1 mg/kg pf, seuil réglementaire.
Les plans de surveillance 2007 et 2008 ont présenté des niveaux de contamination de la lamproie supérieurs au seuil réglementaire.
Le plan de surveillance 2008 des contaminants chimiques dans les produits de la pêche montre que le niveau moyen de contamination en MeHg dans les produits de la pêche consommés en France semble satisfaisant, avec un taux de conformité de 97,8 %. Les 2,2 % de résultats non conformes concernent uniquement des espèces appartenant à la liste Afssa des poissons prédateurs sauvages et dont la consommation est considérée comme plus faible que celles d'autres espèces.
Ré-évaluation des recommandations de consommation (2009)
En 2008, un nombre inquiétant de dépassements des seuils réglementaires en mercure sur des denrées similaires importées au sein de la communauté européenne a été constaté. La DGAL a donc saisi l'Afssa pour interpréter l'ensemble des résultats : plan de contrôle des 91 requins en 2007, 449 résultats d'alertes communautaires pour la période 2002 à 2008 et les données des plans de surveillance DGAL de 1999 à 2008 (14 lamproies et 150 sélaciens).
L'Agence, au regard de l'analyse des données de contamination en mercure et de consommation disponibles, maintient et complète les recommandations émises dans son avis n°2006-SA-0003 du 6 juillet 2006 :
Recommandations aux femmes enceintes ou allaitant ainsi qu'aux enfants en bas âge (< 30 mois)
- éviter à titre de précaution la consommation des espèces de poissons prédateurs (l'espadon, le marlin, les requins notamment les sikis) et les lamproies,
- favoriser une consommation diversifiée des différentes espèces de poissons,
- limiter la consommation de poissons prédateurs sauvages à moins de 60 grammes par semaine pour les enfants de moins de 30 mois, et à moins de 150 grammes par semaine pour les femmes enceintes et allaitant.
L'Afssa précise que cette recommandation ne concerne pas les femmes en âge de procréer, dans la mesure où, contrairement à d'autres contaminants qui peuvent s'accumuler tout au long de la vie, le MeHg est excrété et métabolisé (demi-vie corporelle estimée à 45 jours).
Conclusion
Les niveaux de contamination en mercure dans les produits de la pêche, surtout dans les poissons sauvages prédateurs, sont une préoccupation constante de santé publique, partagée au niveau international, avec des recommandations de consommation à destination des populations les plus sensibles, à savoir les femmes enceintes et les enfants en bas âge dans de nombreux pays. Toutefois une étude française montre que ces recommandations ont, certes, un impact sur la population, mais que celui-ci est atténué avec le temps, notamment en raison de l'ancrage profond des bénéfices liés à la consommation de poissons (notamment les effets positifs des oméga-3).