Notice

Réunion d'experts FAO/OMS sur l'application des nanotechnologies dans l'alimentation et l'agriculture : implications potentielles sur la sécurité des aliments

FAO/WHO expert meeting on the application of nanotechnologies in the food and agriculture sectors: potential food safety implications

Rapport FAO-OMS, 2009, p. 1-104 - Texte en Anglais

Adresse internet : http://www.fao.org/ag/agn/agns/expert_consultations/Expert%20Meeting%20Scope%20and%20Objectives%20French.pdf


Analyse

Le potentiel des nanotechnologies est très prometteur dans de nombreux domaines. Plus de 800 produits basés sur les nanotechnologies sont actuellement disponibles sur le marché mondial, dont 10 % sont des aliments, des boissons ou des emballages alimentaires (surtout aux USA, Japon et Chine). De très nombreux produits sont au stade de recherche et développement.
Ces produits issus des nanotechnologies peuvent cependant introduire des risques pour la santé et pour l'environnement, il est donc nécessaire de connaître l'exposition alimentaire aux nanomatériaux, leurs effets physiologiques et leur toxicité potentielle. C'est à partir de ce constat que s'est tenu une réunion d'experts FAO/OMS en juin 2009, autour de trois grands thèmes : l'utilisation des nanotechnologies dans les secteurs agroalimentaire et agricole, l'évaluation des risques pour la santé humaine et la communication sur les nanotechnologies.
Utilisation des nanotechnologies en agro-alimentaire et en agriculture
Les nanotechnologies offrent des opportunités considérables, de la production primaire au conditionnement des denrées alimentaires. L'annexe 4 du rapport présente quelques produits issus des nanotechnologies et leurs applications, actuelles ou futures :
- ingrédients alimentaires nanostructurés (amélioration du goût, de la texture, de la stabilité des émulsions - diminution des teneurs en matière grasse...) ;
- substances bioactives nano-encapsulées (protection de la dégradation des nutriments durant le procédé, la conservation - amélioration de la biodisponibilité...) ;
- additifs organiques nanométriques (diminution des quantités d'additifs - meilleure dispersion des additifs insolubles sans ajout de matière grasse...) ;
- additifs inorganiques nanométriques (activité antimicrobienne incorporée à un emballage - protection UV - barrière pour certains gaz...) ;
- surface ou revêtement en nanomatériaux fonctionnels (surface " auto-nettoyante " - meilleures flexibilité, stabilité et biodégradabilité des emballages) ;
- produits agrochimiques nanométriques (amélioration de la libération des fertilisants, de l'efficacité des pesticides, du dosage des médicaments vétérinaires...) ;
- nanocapteurs (étiquette assurant la non altération du produit, l'intégrité de l'emballage...) ;
- nanométaux pour décontaminer l'eau ;
- nanofiltration.
Plus de 150 applications des nanotechnologies dans les aliments seraient en cours de développement. Les efforts sont surtout concentrés sur les produits à forte valeur ajoutée. 460 brevets ont déjà été déposés. Les principaux thèmes de recherche sont :
- diminuer la teneur en sel, en matière grasse, en colorants et autres additifs, afin de promouvoir des aliments " santé " ;
- améliorer ou modifier l'apparence et les caractéristiques d'un aliment (couleur, goût, texture et sensation en bouche) ;
- contrôler la libération des arômes et des nutriments (vitamines, anti-oxydants...) ;
- augmenter la biodisponibilité et l'absorption des nutriments ;
- développer de nouveaux capteurs pour détecter rapidement bactéries et virus ;
- introduire de nouveaux revêtements de surface pour les emballages et les équipements de traitement des aliments.
Les experts mettent en avant le besoin d'harmonisation au niveau international des définitions des produits issus des nanotechnologies et de leurs applications ainsi que la nécessité de développer une procédure de classification des nanostructures.
Evaluation des risques pour la santé
Les nanostructures sont caractérisées par un rapport surface/volume important qui peut provoquer des modifications du profil de toxicité. Vu leurs propriétés physico-chimiques spécifiques, les nanoparticules sont susceptibles d'interagir avec d'autres substances présentes dans les aliments (protéines, lipides...) et pourraient former des molécules de toxicité différente. Le cycle de vie de la nanostructure doit aussi être considéré, notamment son devenir dans l'environnement, afin d'évaluer les risques d'exposition indirects. L'impact sur la santé dépend, en effet, de l'exposition du consommateur aux nanostructures et du comportement de celles-ci.
Les analyses pour caractériser ou détecter des nanoparticules sont complexes. Les paramètres à étudier sont en effet nombreux : taille, forme, composition chimique, charge de surface, réactivité, présence de contaminants dérivés de la synthèse, biodisponibilité, biopersistance... Ces analyses doivent être accompagnées par des études de biocinétique (absorption, distribution, biotransformation et élimination) et par des tests de toxicité (toxicité aigüe, chronique), spécifiques à chaque nanostructure, nanomatériau...
Actuellement il manque de données et de méthodes pour évaluer le risque. Les experts recommandent de maintenir voir d'améliorer le niveau actuel de protection, d'encourager la recherche multidisciplinaire qui pourrait conduire à des stratégies d'évaluation du risque, et surtout de développer des méthodes et des tests validés, de faire un inventaire des produits incorporant des nanomatériaux avec les informations toxicologiques et d'exposition existantes...
Communication
L'attitude des consommateurs vis-à-vis des nanotechnologies est complexe et diffère d'une culture à une autre. Ceux-ci veulent comprendre les risques et les bénéfices, et être assurés que ces derniers sont tangibles. Sans bénéfice apparent, les consommateurs n'ont pas une impression positive sur l'utilisation des nanotechnologies pour améliorer les produits alimentaires. C'est pourquoi un dialogue transparent est nécessaire avec toutes les parties intéressées. Différents concepts, stratégies et exemples sur cet aspect sont présentés dans la dernière partie du rapport.
En reconnaissant l'importance de bâtir une relation de confiance, les experts proposent que la FAO/OMS identifie les mécanismes supports au besoin de transparence et de traçabilité des produits alimentaires issus de nanotechnologies. Ils recommandent, entre autre, l'ouverture d'un forum de discussion et encourage les institutions à prendre des engagements sur ces questions afin de rassurer les consommateurs...
N.B. En mars 2009, l'EFSA a publié un avis sur les risques potentiels des nanotechnologies en terme de sécurité des aliments destinés à la consommation humaine et animale.
Le comité scientifique de l'EFSA avait également conclu que les manques de données et de méthode rendaient très difficile l'évaluation des risques et recommandait d'étudier l'interaction et la stabilité des nanomatériaux, de développer et valider des méthodes de détection, de quantification et de caractérisation.
Avis de l'EFSA : http://www.efsa.europa.eu/EFSA/efsa_locale-1178620753816_1211902361968.htm
Analyse réalisée par : Kolypczuk L. / IFREMER