Notice

Consommation de poisson et santé des enfants et des jeunes adultes

Fish consumption and the health of children and young adults

Thorsdottir I.*, Ramel A.

* Unit for Nutrition Research, Landspitali Univ. Hospital and Depart of Food Science and Human Nutrition, University of Iceland, Eiriksgata 29 101 Reykjavik, Iceland ; E-mail : ingathor@landspitali.is

Improving seafood products for the consumer, 2008, p. 136-164 - Texte en Anglais


Analyse

1 - Produits de la mer et nutrition humaine
1 - 2 Young
Ce chapitre est un état des lieux des connaissances et des études épidémiologiques menées sur les effets de la consommation de produits de la mer sur divers aspects santé : obésité, surpoids, lipides sanguins, grossesse et complications, dépression post-natale, et santé des os.
- Effets sur l'obésité et le surpoids
Les problèmes de poids ne cessent d'augmenter, comme les risques qu'ils représentent : maladies cardiovasculaires, diabètes... En France, d'après l'enquête ObEpi, publiée fin 2006, plus de 12 % de la population adulte est obèse, et 30 % en surpoids. L'obésité touche de plus en plus les enfants et les jeunes adultes, et les formes graves ont doublé ces dernières années. L'un des objectifs annoncés par le gouvernement, dans le cadre de son 2ème programme " nutrition santé " (PNNS 2), est de " réduire de 20 % l'obésité de l'adulte, et d'interrompre l'augmentation de la prévalence de l'obésité chez les enfants ".
Des études sur des rongeurs ont montré que les régimes alimentaires riches en oméga 3 marins permettaient de diminuer la croissances des adipocytes et d'augmenter la béta-oxydation. De même, il a été prouvé que la taurine, un acide aminé présent dans le poisson, favoriserait la perte de poids chez l'homme.
Dans le projet Young, une étude d'intervention randomisée a été menée en Islande, en Irlande et en Espagne pendant 8 semaines, sur des jeunes adultes en surpoids et obèses (324 hommes et femmes de 20 à 40 ans avec un IMC -indice de masse corporelle- de 27,5 à 32,5 kg/m2). C'est la première étude comparant les effets d'un régime alimentaire avec restriction énergétique (1 600 calories par jour) contenant soit du poisson maigre (cabillaud : 150 g, 3 fois/semaine), soit du poisson gras (saumon : 150 g, 3 fois/semaine) ou de l'huile de poisson (6 capsules par jour) à un régime contrôlé sans produits de la mer.
Les conclusions indiquent que les régimes à base de poisson, quels qu'il soient, permettent aux hommes en surpoids une perte de poids significativement plus importante qu'un régime ne contenant pas de poissons (1 kg de plus en 4 semaines). Les protéines de poisson auraient également un impact. Les oméga 3 ne seraient donc pas les seuls composés bioactifs sur la perte de poids.
- Effets sur les lipides sanguins
Le taux de lipides sanguins a une influence sur l'athérosclérose et sur les maladies cardiaques. Il serait démontré que les oméga 3 permettent de diminuer l'agrégation plaquettaire et la teneur en triglycérides dans le sang.
Dans le cadre de l'étude épidémiologique décrite précédemment, le projet a prouvé qu'un régime alimentaire supplémenté en poissons diminuait la concentration en triglycérides et en cholestérol dans le sang. L'effet est plus marqué lorsque le régime est riche en oméga 3, mais reste significatif pour une consommation de poissons maigres à la fréquence de 3 fois/semaine. Ceci prouve l'importance des protéines de poissons sur la santé.
- Effets durant la grossesse et ses complications
L'apport de poisson durant la grossesse a été corrélé positivement avec la taille du bébé à la naissance, ainsi qu'au diamètre de son crâne. Or la taille à la naissance et les perturbations métaboliques chez l'adulte seraient liées, notamment l'intolérance au glucose, l'hypertension et les maladies coronariennes. Toutefois cette tendance s'inverserait chez les gros consommateurs de poisson, il existerait donc un seuil à déterminer.
D'autre part, l'hypertension artérielle est la cause principale de mortalité et de morbidité durant la grossesse. Les femmes ayant subi ce problème ont plus de risques de mourir ensuite d'une maladie cardiaque. Les désordres hypertensifs durant la grossesse touchent 5 à 10 % des femmes dans le monde (10 % en France). Un apport en huile de poisson de 0,1 à 0,9 g d'oméga 3 par jour permettrait de diminuer la fréquence des désordres hypertensifs. Au delà, l'effet est inhibé (du à de fortes teneurs en vitamine A). Ces doses doivent être validées.
Par contre, un apport d'oméga 3 n'aurait pas d'effet sur la diminution du risque de pré-éclampsies (syndrome précurseur de l'éclampsie pouvant survenir en fin de grossesse et conduire à des convulsions et à un coma), voire les favoriserait à forte dose (à cause de concentrations importantes de vitamines A et D).
- Effets sur la dépression post-natale
Les teneurs en EPA et DHA diminuent durant le 3ème trimestre de la grossesse. Le " Baby blues " affecte 5 à 20 % des femmes ayant donné naissance. Certaines études ont montré qu'une augmentation de 1 % de la teneur en DHA dans le sang permettrait de diminuer de 59 % des symptômes dépressifs, et que l'occurrence de ce type de dépression était inversement corrélée à la consommation de produits de la mer et au contenu en DHA du lait maternel.
Au sein du projet, une étude prospective a été réalisée au Danemark sur une cohorte de 19 470 mères. Les premiers résultats indiquaient que la consommation de poisson prévenait les dépressions post-natales, toutefois si d'autres facteurs de risque sont pris en compte, comme le fait de fumer ou le statut social, ces résultats ne sont plus significatifs. D'autres analyses sont en cours et de nombreuses questions doivent encore être débattues (doses, temps de traitement...).
- Effets sur la santé des os
Des études antérieures ont montré qu'une déficience en acides gras essentiels était associée à une perte de la synthèse du tissu connectif, à une diminution du cartilage et à une déminéralisation de l'os. Or l'ostéoporose, pathologie à prédominance féminine, concernerait en France près de 3 millions de femmes.
Au sein du projet, l'effet de la consommation de poissons sur l'os durant un régime hypo énergétique chez des jeunes européens en surpoids a été testé. Les résultats préliminaires indiquent que la consommation de poisson, dans ce cas précis sur la courte durée de l'étude, ne pouvait empêcher la résorption de l'os.
Les résultats de certaines études épidémiologiques tendent ainsi à prouver l'effet du poisson ou des oméga 3 sur la santé. Toutefois, il s'avère encore prématuré de communiquer sur ces aspects. Des études complémentaires sont en effet nécessaires pour connaître les doses à recommander suivant l'effet souhaité.
L'article se termine avec un tableau récapitulatif des effets des poissons en général, des oméga 3 marins et des protéines de poisson sur différents problèmes de santé en indiquant si les preuves obtenues par les études épidémiologiques sont suffisamment pertinentes ou si elles sont encore trop limitées. Les résultats de ce projet montrent l'importance de la consommation de poisson en général sur la santé, et non uniquement d'huile de poisson. Les dernières données devraient être publiées en 2009.
Analyse réalisée par : Kolypczuk L. / IFREMER