Notice

Les microorganismes et les microalgues, sources de pigments pour un usage alimentaire : bizarrerie scientifique ou réalité industrielle ?

Microorganisms and microalgae as sources of pigments for food use: a scientific oddity or an industrial reality?

Dufosse L.*, Galaup P., Yaron A., Arad S.M., Blanc P., Chidambara M., Kotamballi N., Ravishankar G.A.

* Laboratoire ANTiOX, Université de Bretagne Occidentale, Pôle technologique de Créach Gwen, 29000 Quimper, France ; E-mail : laurent.dufosse@univ-brest.fr

Trends in Food Science and Technology, 2005/9, Vol. 16 (9), p. 389-406 - Texte en Anglais


Analyse

Les microorganismes et les microalgues produisant des pigments sont communs dans la nature, mais seulement 5 produits ont atteint l'échelle industrielle.
Monascus est un champignon cultivé en Asie. Son pigment rouge est utilisé dans l'alimentation. La consommation annuelle au japon était de 600 tonnes à la fin des années 90 pour un marché de 1,5 millions de dollars. Les pigments de Monascus forment un groupe de métabolites appelés azaphilones. Ils ont une faible hydrosolubilité, sont sensibles à la chaleur, instables dans un pH compris entre 0 et 10, et passent à la lumière. Plusieurs méthodes brevetées tentent de les rendre hydrosolubles. Des molécules anticholesterol ont été de plus identifiées. Les méthodes de cultures sont disparates. Globalement Monascus pousse sur tout substrat contenant de l'amidon, en cultures submergées ou sur milieu solide. Une sélection a permis d'obtenir des souches exemptes de mycotoxine. Malgré le fort potentiel économique des pigments de Monascus, le monde occidental éprouve des difficultés à faire évoluer les mentalités des agences alimentaires publiques.
Penicillium oxalicum produit un colorant rouge de la famille des anthraquinones. Des brevets tchèques couvrent l'industrie alimentaire et cosmétique et de nombreuses données sont disponibles sur la toxicologie, les propriétés antibiotiques, antitumorales et anticancéreuses.
Les microalgues produisent un panel de molécules variées, tels les carbohydrates, protéines, acides aminés essentiels etc... Les pigments principaux sont la chlorophylle a, b et c, le ß-carotène, la phycocyanine, des pigments xanthophylles et la phycoérythrine. La demande est croissante en couleurs naturelles dans l'alimentation, la pharmacie, la cosmétique, le textile et les encres d'imprimerie. Les algues sont « écologiques » et renouvelables et les pigments principaux sur le marché sont la phycocyanine (pigment bleu de spiruline) le ß-carotène (pigment jaune de Dunaliella) et l'astaxanthine (pigment jaune-rouge d'Haematococcus).
Le ß-carotène naturel contiendrait des caroténoïdes essentiels qui ne serait pas dans les préparations de ß-carotène synthétiques. Les applications en santé du ß-carotène sont rapportées et concernent ses caractéristiques antioxydantes, anti cancer, anti acné, anti vieillissement. Outre ces propriétés et ses capacités de coloration qui en font l'un des produits phare, le ß-carotène est utilisé en alimentation animale. La production en microalgue comporte de nombreux avantages : plus grande quantité, possèdent des isomer cis et trans, ainsi que des caroténoïdes oxygénés. La biomasse est utilisable pour la panification entre autre. La cellule entière peut être administrée car elle est sûre.
Haematococcus est une algue verte qui accumule de l'astaxanthine, utilisée en pharmaceutique, nutraceutique et en nutrition animale (saumon et truite). Les contraintes sont cependant un peu plus élevées que pour la culture de Dunaliella, dans la mesure ou la biologie d'Haematococcus impose une culture en circuit clos. L'astaxanthine est l'un des plus intéressants des caroténoïdes dans la mesure où son pouvoir antioxydant est 10 fois plus élevé que le ß-carotène, et sa capacité colorante plus forte.
La place de l'astaxanthine est ensuite discutée, comme antioxydant, en santé et comme colorant pour l'industrie piscicole. L'algue rouge Porphyridium possède une valeur nutritionnelle et thérapeutique. Parmi ses composées, on citera les polysaccharides, les acides gras polyinsaturés, les caroténoïdes comme la zéaxanthine et les phycobiliprotéines fluorescentes. Celles-ci sont aussi sources de pigments rouges et bleus.
Tendances. Les pigments traditionnels continuent à être utilisés avec succès, mais les préférences des consommateurs vont de plus en plus vers les additifs naturels. Les projets alliant la biologie moléculaire et les pigments rencontrent un succès relatif. La génétique combinatoire est à son début, grâce aux séquences de gène de caroténoïdes de plus en plus nombreux.
Analyse réalisée par : Cadoret J.P. / IFREMER