Notice

Ce que les détaillants doivent savoir au sujet de la fumée sans saveur

What fish retailers need to know about tasteless smoke

Eurofish, 2003-10, n° 5, p. 80-83 - Texte en Anglais


Analyse

L’utilisation de la « tasteless smoke » ou fumée sans saveur pour la préservation de la fraîcheur (couleur, texture et flaveur naturelle) de filets de thon (ou autres poissons comme le tilapia, l’espadon, la dorade coryphène...) malgré une congélation, décongélation se développe actuellement sur le marché internationale. Cette fumée est une fumée super-filtrée.
La fumée est obtenue par pyrolyse de bois (à température inférieure à 450°C), puis filtrée pour éliminer la phase particulaire et la majeure partie des composés aromatiques de la phase gazeuse, pour descendre en-dessous du seuil de perception sensorielle de la fumée. Cette fumée épurée peut soit être mise en contact avec le produit à traiter dans une enceinte de fumage ou incorporée dans l’emballage pour les produits minces, soit condensée pour une revaporisation ultérieure. Il semble également possible d’injecter directement cette fumée dans le poisson à traiter. Les substances principales qui composent la fumée sans saveur sont l’azote, le monoxyde de carbone, le dioxyde de carbone, l’oxygène, le méthane, l’hydrogène et quelques traces de composés phénoliques, d’aldéhydes, d’esters et d’hydrocarbones.
Ce traitement a un effet significatif sur la stabilisation ou l’intensification de la couleur rouge du thon après décongélation, même sur un produit congelé depuis quelques mois. Par rapport à cet aspect, le monoxyde de carbone joue probablement le rôle principal pour limiter les réactions oxydatives de l’hémoglobines et de la myoglobines. Un effet intéressant de préservation de la texture et de la flaveur semble également observé pour les produits traités réellement frais.
Une inhibition du développement de certaines bactéries par le traitement à la fumée sans saveur semble également exister. L’intérêt sanitaire de pouvoir travailler avec un produit ayant subi une congélation existe, notamment par rapport aux produits consommés crus. De même, l’intérêt économique d’un transport à l’état congelé permet largement de compenser, pour des produits à forte valeur ajoutée, le surcoût lié à l’emploi de cette fumée dont l’obtention est très onéreuse.
Toutefois, il semble raisonnable de se poser la question de savoir s’il ne s’agit pas là d’une tromperie possible du consommateur ou de l’acheteur qui perd ainsi les références visuelles habituelles de « fraîcheur » du produit. Le risque de réactions allergiques à l’histamine est également probablement amplifié en raison de l’augmentation du temps de stockage.
De même, des résultats légèrement moins significatifs mais proches, notamment sur l’aspect couleur, peuvent être obtenus en utilisant directement du monoxyde de carbone (traitement nettement moins onéreux). Ce dernier traitement est prohibé dans la plupart des pays industrialisés pour le poisson. La commission européenne réexamine, à la demande de la Norvège utilisateur du monoxyde de carbone parmi les gaz dédiés à l’emballage sous atmosphère modifiée, la possibilité d’un emploi modéré du monoxyde de carbone.
La fumée sans saveur peut apparaître comme un traitement de substitution au traitement au monoxyde de carbone, voire même pour les moins honnêtes, un moyen de vendre un traitement prohibé au monoxyde sous l’appellation traitement à la « tasteless smoke », car les moyens analytiques de vérification a posteriori du traitement réellement effectué ne sont pas encore disponibles. Or la FDA (Food and Drug Administration), responsable des tests sanitaires (= GRAS Generally recognized as safe), a rendu un avis favorable sur la tasteless smoke sous réserve d’une information claire du consommateur.
Analyse réalisée par : Baron R. / IFREMER