Notice

Listeria monocytogenes : une bactérie responsable d'infections graves mais adulée des biologistes cellulaires

Cossart P.

Unité des Interactions Bactéries Cellules, Institut Pasteur, 28 rue du docteur Roux, F75724 Paris cedex 15

Cahiers de Nutrition et de Diététique, 2002, Vol. 4 37, p. 273-278


Analyse

La listériose est une maladie qui résulte de l'ingestion d'aliments contaminés par une bactérie, Listeria monocytogenes, et qui se manifeste essentiellement par des méningites, des méningo-céphalites, des septicémies et des avortements. Plus récemment, il a été montré que Listeria était aussi à l'origine de gastro-entérites. Le nombre de cas de listérioses humaines a diminué, passant de 800 cas/an en France il y a 10 ans à environ 200 cas en 1999, mais le taux de mortalité reste très élevé : 30%. Les cas de listériose sont en majorité sporadiques et affectent généralement des individus au système immunitaire peu efficace (personnes âgées, nouveaux-nés, femmes enceintes, personnes suivant un traitement immunosuppresseur). Néanmoins, des poussées épidémiques ont été recensées. On parle d'épidémie quand tous les cas sont dus à la même souche (typage moléculaire effectué par le laboratoire de référence des Listeria de l'Institut Pasteur).
L. monocytogenes contamine une large gamme d'aliments : produits laitiers, carnés, végétaux ... C'est une bactérie capable de se multiplier sur une plage de température exceptionnelle (2°C à +42°C) et de supporter des concentrations en chlorure de sodium allant jusqu'à 10%, un pH de 5 et 9,5 et des conditions d'aérobiose ou d'anaérobiose. Par ailleurs, ce germe survit à des traitements drastiques de dessiccation ou cycles de congélations-décongélations successives.
L. monocytogenes fait partie des bactéries qu'on qualifie d'invasives car elle est capable de résister au pouvoir bactéricide des macrophages et d'entrer dans des cellules normalement non phagocytaires, telles que les cellules épithéliales ou les cellules hépatocytaires. Le scénario de la maladie est le suivant : les bactéries via les aliments arrivent dans la lumière intestinale, traversent cette barrière et gagnent la rate et le foie via le sang et la lymphe. Là, la plupart des bactéries sont normalement éliminées par les défenses non spécifiques, en particulier les neutrophiles, mais chez les personnes immunodéprimées, L. monocytogenes peut se multiplier dans les hépatocytes, repasser dans le sang et gagner les organes finaux que sont le cerveau et le placenta. Des avancées très importantes ont eu lieu cette année avec la découverte de la façon dont L. monocytogenes traverse la barrière intestinale et les mécanismes mis en jeu sont décrits dans cet articles. Notons cependant que malgré les connaissances actuelles et bien que le génome de L. monocytogenes soit entièrement séquencé, aucune technique moléculaire à l'heure actuelle ne permet d'affirmer la phatogénicité d'une souche : ainsi, toutes les souches de L. monocytogenes doivent être considérée comme a priori pathogène pour l'homme.
Analyse réalisée par : Leroi F. / IFREMER